Pas encore un autre blogue sur la créativité? Sujet très à la mode, si la créativité était un individu, il ne saurait où donner de la tête. Ce serait le Guylaine Tremblay des expressions. Partout et très bien vu.

Aujourd’hui, même les banques offrent des solutions « créatives ». Mais finalement, c’est quoi être créatif? Est-ce nécessaire tout le temps? Est-ce que ça s’applique en tout? Et est-ce réservé à certains domaines? Ayant une certaine expérience en la matière (ridules à l’appui…), je vais tenter de vous formuler ma vision de cet impératif qui est parfois mal utilisé.

Pour commencer, la créativité appartient à tous les domaines. Les scientifiques sont nécessairement des créatifs au même niveau que les designers par exemple, la démarche créative étant une volonté de trouver une solution à un problème. Or à chaque fois que l’on cherche à répondre intelligemment à un enjeu, quel qu’il soit, notre créativité (appelons-la aussi inventivité, innovation ou résolution de problème) est sollicitée. Consciente ou pas, la démarche qui tend à résoudre un problème est un acte créatif.

Mais en communication, la créativité n’a de valeur que si elle est pertinente. Trouver une solution originale et inédite ne rend pas service si elle ne répond pas aux objectifs du projet. Car en fait, ce n’est plus une solution. C’est ainsi que la créativité mal dirigée peut tourner à vide. C’est particulièrement vrai en design. Contrairement à la peinture, le design n’est pas une démarche d’expression totalement libre de toute exigence. Le design d’objet, de mode ou graphique est la réponse à une commande, à un besoin. L’interprétation d’une idée, d’un concept, d’une stratégie.

À l’inverse, une  vision et une interprétation différentes de la réalité, bref, un esprit créatif, pourront plus facilement entrevoir des solutions nouvelles en dehors de la boîte. Mais cette fraîcheur conceptuelle, cette créativité pure doit être préservée. Un grand cinéaste que j’aimais beaucoup, André Melançon, le présentait ainsi : « La compétence peut être un frein à la créativité ». J’ai trouvé cette observation d’autant plus géniale qu’elle me semblait exprimer exactement l’un des pièges à éviter dans notre métier.

C’est que plus on devient compétent, disons habile à faire quelque chose, plus on est tenté par les automatismes et les zones confortables. Connaissant la recette, on peut être très efficace sans remettre notre vision en question. Alors qu’emprunter des chemins différents demande une démarche plus longue, plus intuitive, parfois hasardeuse car remplie d’essais-erreurs. Ainsi l’efficacité, aussi rentable soit-elle, peut à mon sens devenir une menace à la réelle créativité.

Mais je m’égare. Si les vertus de la créativité ne sont plus à faire, est-ce pour autant nécessaire d’être créatif en tout? Je pense que non. Certaines idées ou images seront toujours des références, des lieux communs, des zones de facilité, des symboles universels. Ces références collectives nous permettent de nous sentir rassurés, impliqués et concernés. Et il faut être judicieux dans notre volonté de refaire à tout prix un modèle qui fonctionne. La créativité pour la créativité, non. La créativité pour comprendre ce qui peut encore servir de notre héritage conceptuel, oui.

Je vais signer ce blogue beaucoup trop long en disant ceci : protégeons nos visions du monde nourries de certaines notions établies et remettons-les en question avec respect et un peu d’audace. Être créatif oui, mais au profit des enjeux stratégiques de communication et en ayant toujours l’intérêt du projet et de ses objectifs. Je crois en l’originalité et au renouvellement tant qu’il soit adéquat, dosé et pertinent. Ah, la pertinence… Pas toujours dans l’équation.

Et de grâce, consommons le terme « créativité » avec modération et pas à toutes les sauces. Comme dans tout, trop, c’est comme pas assez.

Vous avez aimé notre article? Partagez-le!