Sur fond de crise sanitaire sans précédent, Atypic souhaite partager des nouvelles de ses causes question de voir comment les uns s’adaptent, ou encore, comment les autres trouvent de nouveaux moyens de mobiliser leur communauté. Merci à tous ceux qui ont accepté de répondre à nos questions pour la rédaction de ces articles!

Entrevue avec Élise Desaulniers, directrice générale de la SPCA de Montréal.

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Atypic : Je reviens aux animaux qui sont actuellement en famille d’accueil… On peut penser qu’ils se portent mieux que s’ils étaient en refuge, mais est-ce qu’au bout du compte ces animaux auront à faire face à une nouvelle séparation, à un autre choc affectif qu’ils auraient pu éviter s’ils étaient restés au refuge?

Élise Desaulniers : Ce qu’on observe de façon générale, c’est que les animaux se portent mieux en famille d’accueil qu’en refuge. Une pause de cage, même si c’est juste pour quelques semaines, c’est toujours bon pour l’animal. Tu sais, les animaux se réadaptent super vite à un nouvel environnement. On aime croire que nos animaux sont vraiment, vraiment attachés à nous, mais si on répond à leurs besoins et qu’ils se sentent aimés, ce n’est pas traumatisant pour eux de passer d’un milieu aimant à un autre. Nos animaux ne sont pas monogames! (Rires)

A : Vous avez dû mettre en pause votre service de stérilisation. Est-ce qu’on peut s’attendre à une espèce de baby-boom animal post-covid, ou à une recrudescence d’animaux errants dans les mois à venir?

ÉD : C’est difficile à évaluer. Comme on est face à une situation sans précédent, on n’a aucune donnée pour faire ce genre de prévisions. Et pour des trippeux de données comme nous, c’est vraiment frustrant! Un peu comme dans le milieu de la santé, on se demande ce qui va arriver si on reporte certaines chirurgies jugées non urgentes : on ne le sait pas. Ce qui est certain, c’est que ce sont des milliers de chats qui ont été stérilisés et qui ne se reproduiront pas. On ne reviendra jamais à la situation qu’on avait il y a 10 ans et on va tout faire pour reprendre le temps perdu !

A : Élise, j’aimerais maintenant qu’on parle de ton équipe et du climat de travail actuel. Vous avez malheureusement dû procéder à des mises à pied…

ÉD : Oui. Je dirais que c’est un peu moins que le tiers de l’équipe qui est touchée en ce moment, soit par une mise à pied temporaire ou une diminution des heures de travail, c’est-à-dire une quarantaine d’employés sur 135. Ce sont des gens qui travaillent dans les départements où il n’y a plus d’activité… C’est vraiment dramatique. On est partis d’une situation de plein-emploi où c’était très difficile de recruter, on s’est battus pour monter une bonne équipe et maintenant, on doit mettre du monde à pied… On espère vraiment pouvoir reprendre nos activités normales le plus vite possible pour pouvoir retrouver ces gens-là. Malgré ça, je te dirais que globalement, le moral est bon! Il y a aussi de belles histoires, comme celle de cette chienne qui était avec nous depuis plus d’un an et qui vient de trouver une famille, car maintenant les gens ont plus de temps pour accueillir un animal dans leur vie!

A : Et en général, d’où viennent vos directives pour faire face à la crise?

ÉD : On s’est basé d’une part sur la réglementation de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ), dont font partie nos vétérinaires, et d’autre part sur ce que les associations de médecine vétérinaire de refuge proposent en fait de meilleures pratiques. On assiste à des webinaires, on reçoit de la documentation, on a des rencontres pour échanger sur des façons de faire… Au tout début, comme les États-Unis étaient beaucoup plus avancés dans la crise que nous, on a pu voir venir certains enjeux un peu en avance, par exemple au niveau de la pénurie d’équipement médical et de médicaments.

A : Ah bon?

ÉD : Oui, dans notre réalité, il faut tenir compte du fait que le matériel médical se fait rare. Masques, gants et même médicaments sont en ce moment préservés pour sauver des vies humaines. Mais certains médicaments sont autant utilisés en médecine qu’en médecine vétérinaire. Le Propofol par exemple, utilisé comme anesthésique général lors de chirurgies sur les animaux comme les stérilisations, fait partie des médicaments en pénurie au Canada et partout dans le monde. La demande a explosé dans les derniers mois parce qu’il permet de garder endormies les personnes atteintes de la Covid pendant qu’elles sont sous respirateur.

A : En terminant, quels sont vos besoins les plus criants en ce moment à la SPCA de Montréal?

ÉD : On a lancé une campagne pour convaincre les propriétaires de logements d’accepter les locataires qui ont des animaux. Il faut signer la pétition et la partager! C’est super important si on veut éviter une nouvelle crise des abandons au 1er juillet, les propriétaires de logements doivent faire preuve d’un peu de compassion… En ce moment, on n’a pas besoin de plus de familles d’accueil, sauf qu’avec l’été qui s’en vient, dès qu’on va pouvoir prendre plus d’animaux, on aura besoin de plus de familles d’accueil pour en prendre soin et d’adoptants par la suite. Quand ça va reprendre, il faudra que les gens soient là, leur soutien va être primordial! On s’adapte tout le temps et on va continuer de tenir de cette façon. Nos sources de revenus sont diversifiées et nos donateurs continuent de répondre à l’appel, alors on est heureux! On ne va pas lâcher, on est là depuis 150 ans!

A : Et c’est vrai que vous avez une communauté de donateurs vraiment engagés! Un grand merci, Élise, pour cette généreuse entrevue!

Fondée à Montréal en 1869, la SPCA de Montréal fut la première organisation vouée au bien-être animal au Canada. Sa mission consiste à protéger les animaux contre la négligence, les abus et l’exploitation, à représenter leurs intérêts et assurer leur bien-être, à favoriser la conscientisation du public et contribuer à éveiller la compassion pour tout être sensible. Elle est maintenant le plus grand organisme de protection des animaux au Québec.

Pour en savoir plus sur leurs activités, faites un tour de ce côté, et pour les appuyer en cette période cruciale pour tous, y compris pour les animaux, c’est juste ici.

Article rédigé par Marie-Hélène Mayrand

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